2ème article de ces séries de « feedbacks ».
5 stages se sont déroulés en France depuis notre retour d’Eloy : 7 au 15 avril, 28 avril au 6 mai, 21 au 27 mai, 4 au 10 juin et 18 au 24 juin entrecoupé par la coupe de France de Voile Contact (1 au 3 juin).
La météo « désastreuse » du premier stage qui se déroulait à Gap n’a pas permis d’atteindre les ~60 sauts prévus initialement (sur 9 jours). Seulement 35 sauts ont pu être effectués par les 2 équipes, dont presque la moitié entre 1500 et 1200m au lieu des 2200~2500m nécessaires au travail. Entre plafond bas et vent violent d’Ouest (et d’Est !!) en altitude et au sol, les 2 équipes de VC2 ont été contraintes presque tous les jours de breaker la séance sans effectuer leurs 8~9 sauts journaliers.
La météo du 2ème stage (Gap) a été plus clémente mais encore loin de permettre de réaliser un stage « confortable ». Les 2 équipes ont du faire abstraction des turbulences en altitude pour tout de même réaliser le travail, se disant que, si elles arrivaient à performer dans des conditions turbulentes, elles y arriveraient aussi plus tard dans des conditions normales.
Pour le 3ème stage qui se déroulait cette fois-ci à Besançon, les orages ont décidé de s’inviter et ont perturbé le déroulement des sauts à plusieurs reprises. Au final, les 2 équipes totalisent 38 sauts sur 7 jours ce qui n’est pas tout a fait l’objectif fixé.
Après la 1ère Coupe de France de Voile Contact de Montbéliard, le 4ème stage s’est déroulé sur Besançon, mais a du être délocalisé, en raison d’indisponibilité d’avion, sur Montbéliard sur la 2ème partie de stage. Malgré cela, grâce à une météo plus clémente sur Besançon les 1er jours et des pilotes habiles pour esquiver les orages sur Montbéliard, les 2 équipes ont pu réaliser un stage correct, malgré la fatigue post-coupe de France.
Le 5ème stage, qui se déroulait à Saumur, a enfin permis aux équipes de se lâcher mentalement sans s’occuper de la météo ou de la séance avec tout de même une journée à 0 saut mais un bilan très positif du stage.
Techniquement, le travail a été difficile à mettre en place.
Plusieurs séquences d’évaluations étaient prévues, afin d’effectuer un bilan post-Eloy après les quelques 110 sauts effectués la-bas et identifier quels étaient les points à travailler en particulier. Ces séquences d’évaluations étaient sensées reproduire les memes tirages qu’en compétition et les 2 équipes devaient les réaliser en déroulant les sauts. Compte tenu des conditions des 2 stages sur Gap, les 2 équipes n’ont pas pu effectuer correctement les séquences et aucun bilan objectif n’a pu sortir avant mi mai.
C’est seulement après les 4 premiers jours du stage de Besançon qu’un point a pu être fait mettant en avant les techniques à approfondir, avec principalement les mouvements vers le bas, mais aussi quelques points particuliers, mais qui reviennent souvent comme les transitions F > D > C par exemple (transition de la droite vers la gauche puis descente) où l’inertie générée par la transition de F vers D peut être pénalisante si mal gérée pour descendre proxy ensuite en C, B ou A.
Cela a pu permettre de terminer le 1er stage de Besançon sur un retour aux sauts appelés « analytiques » où chaque transition est répétée un maximum de fois entrecoupée de pauses pour reprendre un vol stable et maitrisé.
Les 2 derniers stages ont repris le même schéma avec 8 sauts d’évaluation d’entrée de jeu suivis de travail spécifique le reste de la semaine. L’accent est mis sur les enchainements de 2 transitions au minimum où le but est de restituer au mieux chacune d’entre elles et d’identifier ce qui empêche d’enchainer, ce qui fait perdre du temps et ce qui nécessite vraiment des pauses volontaires pour revenir dans le bon « mouv’ ». À l’issue, les 2 équipes terminent sur des bonnes sensations et le travail commence à bien restituer.
Matos, matos, matos …
Tout en améliorant leurs techniques, les équipes continuent d’optimiser leur matériel, avec une attention particulière pour les voiles, élément clé dans notre discipline.
En 2011, toutes les équipes de France de Voile Contact ont choisi de passer sur les CF Storm de Performance Designs (le VC2 A était déjà en Storm 107 depuis 2009) et en 2018, elles totalisent plus de 47 000 sauts avec celles-ci, principalement en 107, 97 et 89. Aussi depuis 2016, les équipes de VC2A ont commencé à participer au développement des XA nommées Tango en réalisant plus de 2000 sauts avec différents prototypes.
Auparavant, les équipes sautaient en Diamant 160 (encore avant en Rubis 140) et Triathlon 135 et 120.
Un gros virage a été pris lors de l’apparition en VC2 des transitions en orientant. Ces techniques imposaient l’utilisation de voiles plus rapides sur trajectoire permettant d’orienter en restant à niveau par rapport à son équipier. En 2007/8, les Triathlon permettaient de réaliser ces mouvements, mais rapidement, l’équipe de France VC2 en 2009 a adopté les premières Storm 107 pour exploiter au mieux ces techniques.
Fort de ce retour d’expérience, toutes les équipes sont passées en Storm début 2011 (120 pour la Séquence à 4, 107 pour la Rotation à 4 et 97 pour le VC2A), ce qui a fait apparaitre de nouvelles problématiques inhérentes au vol rapide des Storm comparées au voiles utilisées précédemment. Entre autre, l’extracteur posé sur l’extrados de la voile se regonflait constamment grace à la vitesse du flux d’air et provoquait des secousses dans le vol, et les voiles ressourçaient (!!!), chose inconnue à l’époque pour ceux qui volaient en Diamant.
Le premier problème a été corrigé par l’ajout d’« étouffe » sur la ligne d’extraction (sorte de disque en coton qui vient étouffer l’extracteur une fois la voile déployée, kill-cone en anglais).
Le second « problème » a été corrigé en changeant les techniques de vol, chose pas forcément aisée : lors du premier stage en Storm (Eloy en février 2011), l’équipe de Séquence à 4 était fortement réticente à l’adoption de leurs Storm 120. Après 40~50 sauts de test, les équipiers voulaient presque repasser en Diamant 160 et soutenaient qu’il allait être très compliqué de faire de la séquence à 4 correctement avec ces voiles. Malgré tout, ils sentaient le potentiel des voiles à moyen terme et il a fallu les 3 semaines du stage pour commencer à remplacer les anciennes techniques.
La venue des Storm dans le Voile Contact a aussi apporté avec elles quelques effets secondaires. D’une part, les ouvertures devenaient plus saines et moins violentes que les Triathlon 135 en particulier et d’autre part, les posés devenaient plus faciles comparés aux Diamant 160. Cela a permis d’augmenter la disponibilité mentale des performers pour les sauts et indirectement augmenter les performances.
Aussi, les ouvertures, plus « progressives » ont obligé les équipes à 4 de modifier leur sortie d’avion avec seulement le numéro 1 et 2 sortant en même temps de l’avion, suivi du numéro 3 après l’ouverture du n°2 et ensuite le 4. En effet, les ouvertures légèrement plus longues ne permettaient plus de sortir à 3 d’un coup (cela provoquait des hauteurs entre le 1 et 3 trop importantes et des risques de croisement pendant la phase d’ouverture). Enfin, ces sorties à 2 et les ouvertures plus progressives n’ont plus nécessité l’utilisation de Pull Out et tous les sac ont été passés en Hand-Deploy.
Lorsque les équipes sont passées en Storm en 2011, elles passaient sur un produit déjà bien abouti. Très peu de modifications ont été effectuées entre les versions de 2011 et celles utilisées aujourd’hui.
La modification majeure a été le passage en Vectran à la place du bon vieux Dacron. Jusqu’en 2011, les CF Storm étaient livrées en standard avec un cone en Dacron 600, chose habituelle en voile contact, car les suspentes étaient suffisamment épaisses pour ne pas blesser lors des prises un peu dures.
En 2012, les CF Storm 107 de la Séquence à 4 ont été livrées en Vectran 750. L’équipe était très sceptique en les recevant, car ce type de suspentes était très fin et malgré le fait que le VC2A de l’époque l’utilisait, la question au niveau des prises dans des formations à 4 se posait sérieusement, mais pas longtemps. Après une journée de sauts, il n’était plus question de revenir à du Dacron. Effectivement, les suspentes plus fines exigeaient d’effectuer des prises plus propres, mais le bénéfice en vol sur les performances des voiles était immédiat. Le Vectran plus fin opposait beaucoup moins de trainée que le Dacron et les Storm ainsi équipées avaient une vitesse sur trajectoire plus élevé et donc un meilleur vol. Autre effet positif, mais que les équipes ont observé plus tard, était la tenue des cotes du cone, le Vectran ne bougeant pas en terme de dimension dans le temps. Grace à cela, les voiles conservaient leurs propriétés en vol tout au long de leur vie.
Ainsi en 2012, les équipes de Voile Contact de Séquence à 4, Rotation à 4 et Séquence à 2 étaient sacrées Championnes du Monde, toutes équipées en CF Storm 107, 97 et 89.
Ensuite, au fur et à mesure des progressions de chaque équipe, celles-ci ont downsizée progressivement. L’adoption de Storm plus petites permettaient une plus grande réactivité, un vol plus rapide avec des voiles plus chargées et un gain de temps immédiat dû aux distances réduites entre les prises grace à des tailles de voiles et de cones plus petits (et donc un gain de temps immédiat sans accélérer les techniques ou les gestuels). Cependant, l’utilisation de voiles plus petites et donc plus nerveuses pardonne moins en ce qui concerne la partie voile-contact du vol et chaque équipe est descendue d’une taille seulement au moment où leur niveau en vol le permettait sans jamais bruler les étapes.
Début 2013, le VC2B passait en 97, puis fin 2013,, la Séquence à 4 passait en 97, et début 2014 la Rotation passait en 89 et le VC2A en 83.
Entre chaque taille de voile, chaque équipe a passé entre 400 et 1000 sauts, exploitant le maximum du potentiel de chaque taille avant de se permettre d’utiliser un modèle plus performant.
Le passage des 107 aux 97 pour la Séquence à 4 a beaucoup apporté. Les nouveaux gabarits « légers » des performers (~82/86kg équipé) était presque sous-chargés sous les 107, ce qui n’était plus le cas avec les 97. Les voiles volaient plus rapidement sur trajectoire, était plus en pression, plus réactives, avec un arc de recouvrement plus grand, bref, que des avantages.
De la même manière en Rotation, le passage en 89 a beaucoup apporté, les 89 s’enfonçant plus que leurs 107 et 97 et les équipiers de la Rotation étant plus chargés (90~95kg équipé).
À 2, les équipes sont progressivement descendues jusqu’à la plus petite taille disponible en CF Storm à l’époque en 2014 (83 ft2). À ce niveau la, nous arrivions à la limite de ce que pouvaient apporter des 7 caissons bi-cellulaires. En fonction de la charge alaire, les performances pouvaient même commencer à se dégrader si la voile était trop chargée comme avec l’équipe de VC2 Techer/Pourcelot pour qui le passage des 89 aux 83 n’a pas apporté autant que pour l’équipe Delay/Collot, plus légères.
Les équipes de 4 ne sont jamais descendues sur des surfaces plus petites.
La Rotation a essayé pendant ~60 sauts les 83 pour au final revenir sur les 89 et tout de même battre le record du Monde en 2016. Lors des sauts en 83, peu de différences étaient notables dans la gestuelle et la technique, mais tout était un petit peu plus facile. Après quelques sauts de réglages et d’adaptation, les voiles descendaient mieux, les rotations étaient plus rapides et quelques dixièmes ont rapidement été grappillés. Seul le posé devenait délicat, car la Rotation étant une discipline ou les voiles sont réglées freinées, cela dégrade significativement le potentiel de la voile au posé (à l’inverse, le VC2 en 83 s’en sortait très bien car le VC2 se pratique avec des voiles plutôt dé-freinées, et donc avec tout le potentiel de la voile au posé). Suite à l’accident au posé de Benoit Rotty en juillet 2015, l’équipe est repassée en 89 et a intégré le remplaçant, Rodolphe Pourcelot, pour participer aux World Air Games en décembre et tout de même ramener l’argent à la maison. L’équipe est restée en 89 jusqu’au Championnat du Monde même après le retour de Benoit dans les sauts. Réalisant 23 pts lors des entraînements (et même un 24), le potentiel était suffisant pour aller chercher l’or à Chicago sans devoir repasser sur les 83.
Pour la Séquence à 4, le choix a été fait de rester en 97 en 2015/16 car il restait du potentiel à exploiter sur ces tailles la. Aussi, l’expérience des autres équipes indiquait que les 89 n’auraient pas eu le même comportement et il aurait probablement fallu adapter certaines techniques de vol. Au final, l’équipe de Séquence à 4 du Qatar gagne en 2016 avec des techniques de vol différentes et plus agressives, une polyvalence totale des 4 équipiers, 1000 sauts/an et … des Storm 89.
Après 2014, le concept Storm arrive au bout de ses capacités. À ce moment la, un gros travail a été demandé à PD afin de produire une nouvelle voile, plus performante que la Storm 83, surtout en ce qui concerne le VC2. L’équipe A de l’époque composée de Charline Delay et Cindy Collot avait bien exploité quasiment la totalité du potentiel de la voile et il ne s’agissait pas de laisser passer devant des concurrents d’un niveau plus faible, mais avec des matériels plus performants que les nôtres. De nombreuses idées ont été proposées à PD, idées sortant des esprits imaginatifs de Jean-Michel Poulet et Guillaume Dubois : des voiles hybrides tri-cell / bi-cell, des voiles en triangle, des voiles en « queue de pie », …
Après un début de saison 2015 compliqué, où entre autre le VC2A, voulant disposer de matériel plus performant que les Storm 83, a effectué ~200 sauts en Matrix 2 de chez NZ Aerosport, PD nous a annoncé que le développement de nouveaux prototypes étaient en cours sans trop en dévoiler et qu’ils seraient opérationnels début 2016. En attendant, ils nous envoyaient des Storm 78 pour Charline et Cindy, voiles avec lesquelles elles ont remporté les World Air Games fin 2015. Ces 78 ont seulement servi à temporiser jusqu’à l’arrivée des prototypes et seules Charline et Cindy ont effectué des sauts avec. Elles ont 150 sauts, dans un état quasi neuf et ne ressauterons probablement jamais.
Début 2016, les prototypes arrivaient sous le nom de code « XA » et en 72ft2. Immédiatement, les performances en vol et leurs potentiels se font sentir. Seules les ouvertures sont capricieuses et les posés très techniques. Les « XA » sont des voiles 5 caissons et tri-cellulaires (alors que la Storm est une voile 7 caissons bi-cellulaire). Elles seront baptisées « Tango » lors des championnats du Monde 2016 par PD, faisant référence au pas de dance que les performers réalisent lors des briefing au sol.
Ce concept de faire des voiles de Voile Contact haute performance en 5 caissons / tri-cell « trainait » dans les tiroirs de PD depuis quelques temps. Cela permet de diminuer la surface encore par rapport aux Storm sans pour autant diminuer les performances, bien au contraire. Aussi, la voile plus rapide et plus en pression est plus solide et « flappe » moins et permet des descentes plus engagées et plus directes. Le travail en haut est aussi plus aisé du fait, entre autre, qu’il n’y a que 6 suspentes au bord d’attaque contre 8 sur la Storm.
Concernant le posé, des modifications sur les brins de commandes ont rapidement rendu ce dernier moins critique et plus gérable. Les ouvertures quant à elles ont été améliorées en modifiant le glisseur et en déplaçant le placement du demi-frein, ce qui a permis de mieux canaliser le cone lors de l’ouverture et éviter des ouvertures en décrochage.
Ainsi, l’équipe de VC2 Charline/Cindy participait aux championnats du Monde 2016 avec ces XA72 bleu-blanc-rouge, écrasant la concurrence avec 41 pts d’avance sur l’autre équipe de France composée d’Alexandra Petitjean et Guillaume Dubois classée seconde (qui eux étaient en Storm 83 compte tenu de leur niveau fin 2016).
En 2017, l’équipe VC2A Alexandra/Guillaume passait en XA83 puis rapidement en XA72, les XA83 devant retourner chez PD et les XA78 n’étant pas encore opérationnelles. Le travail avec PD a ainsi continué via des feedbacks denses sur le comportement des voiles.
Cela a permis entre autre de déceler et corriger une des raisons probables qui généraient les autorotation à l’ouverture, et d’aboutir à la production de XA78 qui ont pu être testées par le VC2A début 2018 à Eloy, retournées à PD pour modification, re-testées et validées par le VC2A et utilisées dorénavant par l’équipe B.
Aujourd’hui, le travail avec PD continue sur le développement des XA, avec comme principal axe de développement l’amélioration des ouvertures aujourd’hui toujours très exigeantes et nécessitant un pliage rigoureusement symétrique et une position à l’ouverture absolument irréprochable. Côté performances, le potentiel est là pour que les 2 équipes de VC2 puissent l’exploiter et ramener des médailles !
Y’a plus qu’à !